Howard Hughes
(1905-1976)
Héritier, fils unique, dans la jeune vingtaine (19 ans), d'une fortune, grâce à cette foreuse pétrolière, en forme de navets dentelés, dont le père avisé avait, au hasard, acheté les droits d'invention pour quelques dollars, (150.00 $), puis qu'il avait mise au point avec un ingénieur, brevetée et mise en location dans la plupart des centres de forage. Assuré de revenus récurrents, Hughes n'aura jamais à se soucier de sa vie matérielle et terminera sa vie, avec un empire de trois milliards, sans jamais en avoir fait la gestion courante, d'abord sous la gérance d'un comptable dynamique et puis d'un groupe de mormons très dévoués.
Il se lançait impétueusement dans diverses aventures, cinéma, aviation, casino, sans connaissance préalable, ni regard des coûts engendrés. Que le gestionnaire s'arrange avec les conséquences.
Mythomane, imprévisible, obsessif-compulsif sévère, il devra s'isoler dans des rituels interminables et terminer sa vie dans une réclusion sordide.
Auparavant, son médecin lui prescrira d'ailleurs, en début des années soixante, des neurostimulants qui lui seront d'un grand profit pour quelques temps.

L'école ne l'intéressait pas et il n'obtint aucun grade. Il préférait le golfe, les plateaux de cinéma de son oncle. Don Juan sans retenue, il exploita son charme et sa fortune, pour séduire les jeunes vedettes du nouveau Hollywood,  le plus souvent avec des diamants, et promesses de mariage jamais conclues.
Il aimait les défis absolus; il pourra réussir le premier tour du monde, avec équipage et escale, en aviation, au poste de pilotage. Il mettra au point l'un des avions les plus rapide et révolutionnaire, le XF-11 qui en vol d'essai, par lui-même, se fracasse dans la banlieue de la ville, faute d'essence, mais dont le pilote trop téméraire ne survivra que par miracle, d'abord du feu, puis de ses multiples fractures.  Il fera ensuite construire, sous contrat de l'armée et propres ressources,  le plus gros et lourd avion du monde, le H-4 Hercules, qui ne survolera l'eau qu'une seule fois, ancêtre des transporteurs modernes.

Mais comprendre cet homme sans postuler des traits autistes minimaux, semble impossible. Il était partout et nul part; plusieurs de ses vies allaient en parallèle, comme ses relations affectives; il pouvait dîner avec trois femmes différentes, dans la soirée de Noël, dans le même hôtel, en trois salles distinctes, avec chacune promesse de mariage, mangeant en chaque assiette.

Capricieux, dans ses habitudes, toute sa vie, il ne mangea que peu d'aliments différents ou variés. Mais "la plupart du temps, Hughes réussit à avaler deux ou trois steaks, un litre de lait, trois ou quatre pots de crème glacée, et six cookies qui doivent contenir seize pépites de chocolat, pas une de plus ou de moins". (1, pp352). Pour ses petits pois, "il fait fabriquer une fourchette en râteau: les gros pois sont ainsi triés, et éliminés", et "de même, quand il reçoit sa portion de gâteau au chocolat, il la mesure avec un  double décimètre. Un millimètre de plus ou de moins, et le gâteau repart en cuisine" (1, pp378).
Les rituels de propreté sont incessants et vont s'accroître avec les années, l'obligeant à s'enfermer, par peur des microbes, dans une pièce totalement isolée, des mois durant, et finalement, par crainte de la contamination, jamais nettoyée, vivant nu, couvrant ses parties intimes de quelques mouchoirs papier, communiquant par codes, messagers spécialement entraînés, des cordelettes à la fenêtre, etc. Quoique après six mois de ce régime dégradant, Hughes pouvait soudainement se mobiliser, pour rencontrer une femme à séduire, défendre une affaire menacée, retrouvant ses habiletés originelles.
Les nuits se passaient souvent dans la salle de visionnement, seul à voir et revoir les mêmes films choisies, souvent pour la pétulance des seins des actrices, ou des cascades héroïques de ses propres productions.

Dans la séduction des femmes, il n'y avait aucune limite à ses ruses:  il organise un système de dépistage vraiment malicieux, à travers des amis (tel Gary Grant), des entremetteurs, une société de cinéma, un studio de photographie de jeunes demoiselles, ambitieuses et naïves, parfois mineures et vulnérables. Il s'agissait d'éblouir avec un tour d'avion romantique, des repas chers (dont il ne profitait pas), des bijoux et diamants et un  promesse de mariage, si nécessaire. La fin justifiait les moyens et il serait difficile de croire à la moindre empathie pour la partenaire d'occasion. Pas de pitié pour la victime à qui il incombe de ne pas être là au mauvais moment.
Il est aussi notable qu'il avait ses liens avec le monde interlope, qu'il usait au mieux des mesures de chantage, de menaces, d'intimidation, pour évincer l'adversaire. Au point qu'il fut indirectement associé au scandale du Watergate, Nixon voulant démasquer les stratégies du protégé de Hughes, au parti démocrate.

Les vies parallèles de Hughes sont bien documentées, et seraient inintelligibles, sans soupçonner un enfermement autiste chez lui, en plus du syndrome débilitant des obsessions-compulsions (TOC).
Claude Jolicoeur, m.d, 2005, ®

1- Howard Hughes, l'homme aux secrets, par François Forestier, chez Michel Lafond, 2005.

Les archives secrètes d'Howard Hughes

Howard Hughes : Le milliardaire excentrique

Filmographie
L'aviateur, avec le réalisateur Martin Scorsese, et  Leonardo DiCaprio en rôle principal